Comment reconnaître une allergie alimentaire ?
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Comment reconnaître une allergie alimentaire ?

Par Nadia Hamam
Temps de lecture: 6 min

Après la montée en flèche des allergies respiratoires dans les années 1990 et 2000, c’est au tour des allergies alimentaires d’inquiéter les spécialistes. En effet, d’après les chiffres avancés lors du 12e Congrès francophone d'allergologie (2017), 3 à 7 % de la population serait touchée par une allergie alimentaire.

Alors que les enfants sont particulièrement sensibles à l’œuf, au lait et à l’arachide, l’adulte réagit davantage au poisson, à l’arachide, aux fruits à coques et aux crevettes. Pourquoi cette évolution ?

 

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Des causes et des amplificateurs multiples

« Nous vivons dans une époque pro allergies » avance la professeure Jocelyne Just, cheffe du service d’allergologie pédiatrique à l’hôpital parisien Trousseau et présidente de la Société française d’allergologie. Auteur du livre Les allergies à paraître cet été chez Mango, elle explique qu’en Occident, « nous évoluons loin de la nature et des animaux ; les microbes qui se développent naturellement sur notre peau et nos différentes muqueuses sont habituellement en contact avec la biodiversité qui nous entoure. Celle-ci diminue à vue d’œil, notamment dans les villes ; notre système microbien se modifie. » Cette altération de l’immunité fait le lit des allergies.

La baisse de ces facteurs protecteurs est aggravée par des facteurs amplificateurs de l’allergie : la pollution atmosphérique mais aussi la mauvaise alimentation. Cette dernière est de plus en plus pauvre en fruits et légumes, riche en sucres, graisses et en produits remaniés incluant de nouveaux allergènes.

 

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La spécialiste évoque aussi les nouvelles manières de manger qui favorisent une hypersensibilité alimentaire à des néoallergènes : « la mode du bio entraine une flambée des consommations de céréales et d’oléagineux. Les boulettes végétariennes incluent des liants à base de pois – et l’allergie à cet ingrédient augmente. Sans parler de tous les aliments reconstitués qui modifient la teneur en éventuels allergènes. » Toutefois, si plus de 20% des Français rapportent des symptômes gênants, tous ne présentent pas une allergie alimentaire authentique, à distinguer de l’intolérance alimentaire.

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Allergies ou intolérances ?

« L’allergie alimentaire est déclenchée par une rupture de tolérance immunitaire vis à vis d’allergènes habituellement inoffensifs, ce qui n’est pas le cas pour l’intolérance », distingue le Pr Just. Cette dernière engendre surtout des inconforts digestifs – symptômes gastro intestinaux aigus, ballonnements. Certains professionnels la rapprochent du syndrome du « côlon irritable ». En cause, la mauvaise digestion des sucres – les fameux FODMAPS ou d’autres sucres comme le lactose peuvent être responsables de symptômes digestifs aigus (diarrhée comprise).

 

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Cette intolérance est la plus souvent acquise mais parfois d’origine génétique. Les symptômes s’améliorent en diminuant l’apport de la substance incriminée. L’hypersensibilité au gluten obéit à la même logique. Il ne faut pas confondre l’intolérance et l’allergie alimentaire – beaucoup plus rare et potentiellement grave. Aux personnes hypersensibles, la spécialiste conseille simplement un régime pauvre en FODMAPS ou en gluten.

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Vous avez dit IgE ?

Il existe une multitude d’allergies alimentaires. Les principales – et les mieux cernées- sont celles de type « IgE », en rapport avec les anticorps du mêmes nom. Les Immunoglobulines E sont des protéines normalement présentes à des taux variables chez tous les individus. Leur dosage aide au diagnostic d’une allergie alimentaire. En cas d’allergie IgE, le corps réagit comme lorsqu’il fait face à une infection ou à un agent nocif. Les réactions varient d’intensité : elles vont du léger gonflement des lèvres, aux réactions de type urticaire, œdème, crise d’asthme, vomissement, diarrhée. Dans les cas les plus sérieux, le fameux œdème de Quinck survient brutalement, serre la gorge avec une difficulté à avaler et parfois une sensation d’étouffement qui peut aller jusqu’à la détresse respiratoire grave.

 

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En haut de l’échelle de gravité, apparaît le choc anaphylactique, qui reste heureusement rare car très dangereux : la réaction allergique s’étend en quelques minutes à tous les tissus de l’organisme, incluant plusieurs organes. Nausées, douleurs abdominales, chute de tension artérielle peuvent mener au malaise, voire au décès. Les allergies IgE sont de plus en plus sévères et guérissent naturellement de moins en moins, alors qu’avant, elles disparaissaient souvent pendant l’enfance. Celles liées au lait ou à l’œuf s’estompent encore durant l’enfance, mais sur des temps de guérison de plus en plus long.

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Des formes plus rares

En parallèle, des manifestations plus rares, hors allergies IgE, sont en expansion. Le syndrome d’entérocolite aux protéines alimentaires engendre des symptômes proches des gastro entérites aigues avec des déshydratations très sévères. L’œsophagite à éosinophiles est une sorte d’eczéma de l’œsophage qui donne un reflux gastrique rebelle, intense. Elle peut être parfois reliée à une allergie IgE. Exceptionnelle, la maladie cœliaque n’est pas du tout liée à une réaction allergique mais à un dysfonctionnement auto immunitaire : le corps se met à fabriquer des anticorps contre son épitéliome digestif en présence de gluten. Dans ce cas, l’éviction du gluten à vie s’impose.

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Des tests dévoyés

Dans un périmètre médical en pleine expansion, « il reste de grandes zones grises », prévient la spécialiste. Une réaction au gluten peut relever d’une allergie au blé, d’une sensibilité non cœliaque au gluten ou d’une maladie cœliaque. Difficile, parfois, de s’y retrouver ! Or, ces dernières années, on assiste à l’émergence de tests (demandés par des nutritionnistes, des naturopathes et autres thérapeutes) et même d’auto tests, à partir d’une simple goutte de sang, réalisés via des kits disponibles en pharmacie ou sur internet.

 

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Non remboursés par la Sécurité Sociale, ils mesurent la présence d’IgG (Immunoglobines G), une autre classe d’anticorps développé par notre système immunitaire.

« Suite à un diagnostic discutable, on prescrit au patient un régime éradiquant une longue liste d’aliments, décrit le Pr Just. Ces dosages se révèlent généralement positifs pour tout le monde : ils témoignent simplement qu’on a été exposé à l’aliment visé. » Concernant les allergies alimentaires IgE, il faut se fier uniquement aux tests cutanés allergologiques, suivis d’un dosage sanguin, réalisés et interprétés par l’allergologue.

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Une prise en charge spécifique

Les tests cutanés consistent à faire pénétrer l’allergène de manière superficielle dans la peau ; celle-ci réagit ou non. Le médecin effectue ensuite un dosage d’IgE, et non pas d’IgG, dirigé contre l’aliment ou une fraction de ce dernier. Il est aussi possible de faire ingérer l’aliment en milieu hospitalier pour surveiller la réaction, dans les cas douteux. D’autres tests sanguins peuvent être réalisés en milieu hospitalier ; certains sont encore réservés au domaine de la recherche. Si l’allergie est avérée, le patient reçoit une prise en charge spécifique : éviction des aliments, guidance dans la lecture les étiquettes (aujourd’hui, 14 aliments doivent être obligatoirement mentionnés sur les étiquettes des produits alimentaires), trousse d’urgence prescrite par le médecin, incluant parfois de l’adrénaline injectable. Quand la maladie ne s’atténue pas ou s’aggrave, il faut procéder à des désensibilisations alimentaires uniquement dans des centres experts.

 

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Gare aux allergies croisées !

En nette augmentation, l’allergie aux fruits à coques mais aussi aux fruits à pépins ou à noyaux de la famille des rosacées est liée… au pollen de bouleau ! Planté en masse après la tempête de 1999, cet arbre est responsable de nombreuses allergies respiratoires en période de pollinisation. Or, son pollen présente une parenté moléculaire avec certains fruits à noyaux (pomme, poire, cerise, pêche etc.) ou à coques, la noisette en tête. Celle-ci est partout présente dans notre alimentation, à commencer par les pâtes à tartiner pour enfant. D’où ces allergiques à ce pollen spécifique qui développent dans la foulée une allergie alimentaire.

Attention, dans ce cas, au risque d’anaphylaxie, par exemple si on ingère un smoothie de fruits ! « Quand on manifeste deux types d’allergies, le risque de réactions graves est accru », prévient le Pr Just. D’où l’importance de consulter un allergologie, dont la connaissance transversale – respiratoire, alimentaire, cutanée- permet des diagnostics précis et des traitements adaptés. L’occasion de rappeler que l’allergologie est devenue spécialité médicale depuis décembre 2016.

Source: marieclaire.fr

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