Si Alessandra Korap Munduruku a reçu ce prix en avril 2023, c’est pour saluer sa lutte impressionnante contre le géant minier Anglo American. L’activiste a mené une campagne acharnée, bien décidée à protéger le territoire des Munduruku, situé au cœur de la forêt amazonienne, des assauts du géant minier britannique. Un combat à la David contre Goliath que la dirigeante autochtone n’était pas destinée à gagner. Cette fois, la lutte populaire a payée car, en 2021, Angelo American a retiré pas moins de 27 demandes de recherches en vue de potentielles exploitations minières. Laissant intact le territoire indigène Sawré Muybu, d’une superficie de plus de 400 000 hectares et abritant certaines communautés Munduruku. Une belle victoire, surtout quand on sait que, entre 2018 et 2021, la déforestation liée à l’exploitation minière a augmenté de 62% en Amazonie.
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Mais Alessandra Korap n’en est pas à son coup d’essai. Déjà en 2014, elle s’était opposée à la construction de barrages hydroélectriques dans la région. Au cours de l’année 2018, l’activiste décide d’étudier le droit pour défendre au mieux les Munduruku. En 2020, Alessandra Korap est déjà reconnue internationalement pour ses combats, elle se voit octroyer le prix Robert F. Kennedy des droits de l’homme et le prix allemand Taz Panter. Malheureusement, la dirigeante Munduruku est menacée au fur et à mesure qu’elle enchaîne les victoires, actuellement ses partisans demandent des mesures pour assurer sa protection. Mais rien n’arrête Alessandra Korap Munduruku, une des militantes les plus badass d’Amérique Latine. En 2020, celle qui est la première femme à coordonner l’Associação Indígena Pariri, déclarait à la BBC, « l’exploitation minière sur nos terres est une autre forme de colonisation. »
Les victoires d’Alessandra Korap, le fruit d’un travail collectif
L’activiste du peuple autochtone brésilien est très présente sur les réseaux sociaux, notamment sur Instagram où elle est suivie par près de 20 000 personnes. Cette présence numérique lui a permis d’avoir davantage de visibilité et ainsi, d’augmenter sa force de frappe face aux géants de l’industrie. Alessandra Korap, c’est une femme forte, inspirante et pleine d’humilité qui n’est pas prête d’arrêter le combat comme elle l’a annoncé après sa récente victoire dont elle ressort plus déterminée que jamais. « Ce prix est venu me dire que dans toute cette lutte, nous sommes capables de faire sortir n’importe quelle entreprise qui veut négocier, qui veut notre mort », relaye Mongabay.
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Si Alessandra Korap parle en « nous », c’est parce qu’elle explique ne pas agir seule, comme l’illustrent ces propos mis en avant par Amazon Watch avec qui elle collabore : « Tout ce que je fais dans mon militantisme se fait avec et pour le collectif. Les dirigeants Munduruku n’agissent pas individuellement et ne recherchent pas la reconnaissance individuelle. Ma lutte et ma voix font partie de processus collectifs, elles existent grâce et avec les chefs traditionnels ainsi que d’autres femmes qui ont défendu nos droits. »
La situation des territoires autochtones au Brésil
Le président Lula, qui a succédé au président d’extrême-droite Bolsonaro, a promis la fin des procédures de démarcation en cours d’ici la fin de son mandat. C’est ce qu’on peut lire sur le site de l’Instituto Socioambiental : « Je ne veux laisser aucune terre indigène qui ne soit délimitée au cours de mon mandat de quatre ans. C’est un engagement que j’ai et que j’ai pris avec vous avant la campagne », a-t-il déclaré après l’officialisation des mesures. Les procédures de démarcations permettent de délimiter des terres indigènes afin de les reconnaître comme telles. Elles se voient ainsi protégées et leur exploitation par des tiers est interdite. Certaines communautés autochtones attendaient que leurs terres soient homologuées comme telles depuis plus de 40 ans !
Au mois d’avril dernier, il restait encore 237 procédures en attente d’être achevées. Lula était encourageant concernant l’issue des terres en attente d’homologation : « Nous allons devoir beaucoup travailler pour pouvoir délimiter le plus grand nombre possible de Terres Indigènes. Non seulement parce que c’est votre droit, mais parce que, si nous voulons atteindre 2030 avec zéro déforestation, nous avons besoin de vous [les peuples autochtones] en tant que gardiens de la forêt », relayait encore une fois l’Instituto Socioambiental. Cependant, mauvaise nouvelle pour les ambitions du président, un vote du 30 mai dernier a dévoilé que la majorité des députés souhaitent limiter les démarcations des terres des communautés à celles qu’elles possédaient en 1988… Les autochtones se défendent en disant qu’ils avaient été injustement chassés d’une partie de leurs terres avant cette date notamment à cause de la dictature militaire (1964-1985). Le projet doit encore être validé par le Sénat pour entrer en vigueur mais pour le moment la situation reste critique. Le combat d’Alessandra Korap n’est donc pas terminé.
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