Jane Birkin, l’icône intemporelle qui a marqué les seventies
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Jane Birkin, l’icône intemporelle qui a marqué les seventies

Par Juliette Hochberg  & Christine Vainqueur
Temps de lecture: 8 min

La légendaire Jane Birkin, véritable incarnation de l'élégance intemporelle, a illuminé les décennies passées avec son allure inégalée, devenant une muse tant pour le monde du cinéma que de la musique des années 70. Avec son association emblématique avec Serge Gainsbourg, Jane a transcendé les frontières artistiques en tant qu'actrice, réalisatrice, icône de la mode, chanteuse et muse. Comment décrire cette icône polyvalente qui a partagé cinq décennies de sa vie avec le public ?

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On a tous une image de Jane Birkin en tête. Un cliché en noir et blanc, un refrain, une robe ou un accent. La voix douce, aigüe, juvénile de la plus frenchie des artistes britanniques. Jane Birkin, disparue dimanche 16 juillet 2023 à l’âge de 76 ans, se balade dans nos imaginaires depuis cinq décennies.

Nous furent les témoins de sa carrière d’artiste et de sa vie de femme, mère, amoureuse.

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Sa première vie, en Angleterre

Jane Birkin est née le 14 décembre 1946 à Marylebone, à Londres. Fille de David Birkin, un officier de la Royale Navy et de la célèbre actrice anglaise Judy Campbell, elle est issue d’une fratrie de trois enfants, composé de son frère aîné Andrew, et sa sœur cadette Linda. Durant l’enfance, elle passe son temps avec sa mère, qui a mis sa carrière entre pause pour élever ses enfants. Contrairement à son frère et sa sœur, la jeune Jane est très introvertie, souvent dans ses pensées.

À ses 11 ans, âge auquel elle gagne son mythique son singe en peluche Munkey à une tombola, elle intègre un internat sur l’île de Wight avec sa sœur. Une rupture brutale avec sa paisible vie. Les jeunes filles y sont appelées par leur numéro de chambre, elle est le « 99 », et sa petite sœur, le « 177 ». La pré-adolescente cumule les mauvaises notes, peine à suivre cette éducation stricte. Elle est moquée pour son physique : ses camarades la surnomment « Half-cast » (moitié fille, moitié garçon), car elle n’a pas de poitrine. Sensibles à son mal-être, ses parents l’encouragent à coucher ses peines sur papier, dans un journal intime. Débute l’aventure littéraire de toute une vie.

Elle écrit tous ses tracas à Munkey. Munkey a même « dormi à (ses) côtés et a partagé (sa) vie avec John », écrit-elle dans Munkey Diaries, le tome 1 de son journal intime paru en 2018 aux éditions Fayard.

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Jane Birkin et John Barry

C’est à 17 ans qu’elle croise la route de ce John. Nom : Barry. Profession : compositeur de musique de film. Elle le rencontre sur les planches, lorsqu’il l’engage en 1965 pour sa comédie musicale Passion Flower Hotel.

Tandis que son frère opte pour la photographie, Jane Birkin décide de se lancer dans la comédie. Elle fait ses débuts au cinéma, dans la comédie Le Knack… et comment l’avoir, réalisée par Richard Lester en 1965. Le film emblématique du Swinging London, une période d’effervescence artistique des années 60, connait un véritable succès.

jane birkin john barry

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Jane Birkin enchaîne avec Blow Up de Michelangelo Antonioni, qui remporte la Palme d’or au Festival de Cannes. À 19 ans, la grâce et le style de la jeune femme sont capturés par l’objectif de Jeanloup Sieff pour Harper’s Bazaar.

Jane Birkin et John Barry se marient en 1967 et accueillent leur enfant, Kate Barry. Jane Birkin, « femme au foyer angoissée », de son propre aveu pour Télérama, divorce finalement d’un John Barry infidèle. Direction Paris pour le tournage de Slogan, de Pierre Grimblat. C’est le début du succès de la Britannique outre-Manche.

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Jane Birkin et Serge Gainsbourg

Sur le tournage, juste après les soulèvements de mai 68, impossible pour elle de s’entendre avec son partenaire de jeu. Un certain Serge Gainsbourg, d’abord exécrable avec elle. Ils tombent finalement fou amoureux. Les deux acteurs ne se quittent plus.

Rapidement après leur rencontre, le chanteur lui fait écouter Je t’aime… moi non plus, d’abord enregistrée avec Brigitte Bardot, sa dernière amante qui refuse que la chanson sorte, parce qu’elle est mariée. Il lui propose de la reprendre, ensemble. Jane Birkin accepte de poser à son tour sa voix, de gémir au micro, et d’interpréter les paroles crues : « Je vais et je viens/entre tes reins/je vais et je viens entre tes reins et je me retiens. Non ! Maintenant, viens ! »

jane birkin serge gainsbourg

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Scandale à la sortie du disque en 1969, surnommée « année érotique ». Le couple devient mythique. La même année, Jane Birkin joue dans La Piscine aux côtés de Romy Schneider et Alain Delon. Et Jane Birkin, muse ultime de Gainsbourg, son grand amour. Pour elle, grâce à elle, il écrira les plus beaux textes d’amour sur ses plus belles compositions.

Ensemble à la vie et à l’écran, Jane Birkin et Serge Gainsbourg s’aiment dans le thriller Cannabis. De leur amour sous les projecteurs naîtra en 1971 leur fille, Charlotte Gainsbourg. Le couple forme une famille unie avec Kate, installé dans son hôtel particulier de la rue de Verneuil, à Paris.

La comédienne est proactive et alterne musique et cinéma, avec la sortie de son deuxième album Lolita, Go Home et La course à l’échalotte, où elle retrouve Claude Zadi, en 1975.

L’année suivante, Jane Birkin choque dans la première réalisation de Serge Gainsbourg, Je t’aime moi non plus, où elle flirte avec l’ambiguïté des genres, en adoptant un look androgyne. La bande-son du film reste culte à cause de la chanson Ballade de Johnny-Jane. En 1977, elle enregistre l’album Ex fan des Sixties et renoue avec le succès.

Pour la première fois, elle tourne avec Jean-Paul Belmondo dans l’Animal et s’essaye au thriller dans Mort sur le Nil de John Guillermin avec Bette Davis. Sa passion avec Serge Gainsbourg s’essouffle. Quand Gainsbourg s’oublie pour Gainsbarre, son double destructeur, Jane Birkin le quitte, inquiète et épuisée de devoir sauver de ses démons l’homme qu’elle aime.

Leur séparation rime avec émancipation. Jane Birkin en 1973 publie son premier album solo Di Doo Dah. Le titre éponyme, qui évoque les changements du corps adolescents, se hisse en tête des charts.

La même année, elle relance sa carrière au cinéma en donnant la réplique à Brigitte Bardot dans Dom Juan 73 de Roger Vadim. L’année 1974 est placée sous le signe de la comédie avec La moutarde me monte au nez de Claude Zidi, aux côtés de Pierre Richard, et Comment réussir quand on est jeune est con, de Michel Audiard.

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Jane Birkin et Jacques Doillon

Agnès Varda, Jean-Luc Godard, ou Jacques Doillon, vont tour à tour filmer sa mélancolie. Elle tombe amoureuse de ce dernier, parce qu’il est le parfait contraire du Gainsbarre déchiré. Mais elle aime aussi, encore, Gainsbourg. « Et quant à Serge, écrit-elle dans Munkey Diaries, même s’il me restait un million d’années à vivre, je ne pourrais jamais plus aimer quelqu’un autant que je l’aime lui. » Elle y confie aussi qu’elle rêvait souvent d’un amour à trois.

Jane Birkin se renouvelle en passant des comédies populaires au cinéma d’auteur avec notamment La fille prodigue, réalisé par son compagnon en 1981. Les années 80, l’aideront à se séparer de son image de baby doll, de « muse de l’Autre ». En 1982, elle accueille sa troisième fille Lou Doillon. Elle enregistre en 1983, Baby Alone In Babylone dont les titres toujours rédigés par Serge Gainsbourg, Baby Lou, Les dessous chics deviendront cultes. L’opus considéré comme la plus belle création entre les deux amants est certifié disque d’or.

Jane Birkin et Jacques Doillon

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En 1985, elle s’essaie au théâtre avec la Fausse suivante de Marivaux de Patrice Chéréau. En 1987, énième collaboration entre Serge Gainsbourg et Jane Birkin pour Lost Song. Le 2 mars 1991, elle perd son amour de toujours et son père cinq jours plus tard. En 1992, elle se sépare de Jacques Doillon.

Elle collabore avec des réalisateurs de renom tels que Jacques Rivette pour La Belle Noiseuse (1991), Noir comme le souvenir de Jean-Pierre Mocky (1995) et On connait la chanson d’Alain Resnais (1997). En parallèle, elle s’investit dans la lutte contre le sida et le racisme. Elle participe à plusieurs éditions du Téléthon et aux concerts des Enfoirés.

En 1999, elle écrit la comédie dramatique Oh ! pardon tu dormais, mis en scène par Xavier Durringer.

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Jane Birkin, icône pop

« Gainsbourg est autant sa créature qu’elle est la sienne », souligne justement la réalisatrice Clélia Cohen, dans son documentaire Jane Birkin, simple icône. C’est elle qui le rhabille dès leur rencontre, le modernise, façonne son image de dandy, bien éloignée de son look adopté jusque là de poinçonneur des lilas.

Jane Birkin, elle, n’a pas besoin de relooking, puisque c’est elle qui lance les tendances. Le panier en osier même à la ville, la mini-robe noire transparente, et même, le style androgyne avec sa coupe garçonne, ses chemises larges, ses tee-shirts unisexe blancs sur des jeans flare.

Serge Gainsbourg et Jane Birkin

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Chanteuse et actrice au palmarès bien rempli, elle a continué à se produire jusqu’à ses dernière années. En 2016, elle entreprend une tournée mondiale intitulée Gainsbourg symphonique. En 2020, Jane Birkin se raconte à travers ses écrits cathartiques, notamment dans son nouvel album Oh, pardon tu dormais, auquel le chanteur et compositeur Étienne Daho participe.

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Ses trois filles, Kate Barry, Charlotte Gainsbourg et Lou Doillon

Frappée par un cancer, la chanteuse s’accroche à la musique et enregistre À la légère en 1999, Arabesque, avec une compilations de titres de Serge Gainsbourg en 2002, Rendez-vous en 2004 et Fictions en 2006.

Jane Birkin poursuit sa carrière d’actrice et en 2007, elle réalise Boxes. Un an plus tard, elle compose entièrement l’album Enfants d’hiver, la muse s’est métamorphosée en une auteure à part entière.

Je voulais être vue par moi-même, même si je n’étais rien 

« Je voulais être vue par moi-même, même si je n’étais rien », résume-t-elle dans Post-scriptum, le second tome de son journal intime qui débute en 1982 par la naissance Lou Doillon, et s’achève en 2013 avec le suicide de son aînée, Kate Barry. Un deuil presque impossible à faire.

Kate Barry, Charlotte Gainsbourg et Lou Doillon

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Kate Barry était photographe. Charlotte Gainsbourg et Lou Doillon, elles, n’ont jamais tranché entre la musique et le cinéma. Une famille, une lignée de femmes talentueuses, inspirées d’une seule, qui compile tous les talents.

En 2017, à la suite d’une péricardite aigüe, l’artiste apprend qu’elle est atteinte d’une leucémie, un cancer du sang. Cette fois encore, le soutien de ses filles l’aidera à surmonter cette épreuve.

En 2021, Charlotte Gainsbourg réalise Jane par Charlotte. Un documentaire à fleur de peau qui suit la vie de Jane Birkin dans sa maison en Bretagne aux côtés de sa fille, alors qu’elles partagent des anecdotes et leurs pensées autour de leur relation, nommé aux César 2023.

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Derniers moments avec son public

En 2021, Jane Birkin programme des concerts à la Philarmonie de Paris. Qu’elle sera contrainte d’annuler à la suite d’un accident vasculaire cérébral. Ce léger AVC l’oblige à annuler d’autres engagements pour la fin d’année.

« Les médecins de Jane Birkin nous informent que suite à son accident vasculaire cérébral, celle-ci doit se reposer jusqu’à la fin de l’année avant de retrouver son public en 2022. Toutes ses activités (dont les trois concerts qu’elle devait donner à la Philharmonie de Paris les 18, 19 et 20 septembre) sont donc reportées à une date ultérieure », était-il détaillé dans un communiqué.

Jane birkin concert

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En mars 2023, la chanteuse annulait un concert prévu à l’espace Avel-vor, à Plougastel-Daoulas (Finistère). L’artiste, qui s’était exprimée auprès du Télégramme, a confié ne pas aller bien « du tout » : « Je me suis cassée l’omoplate et j’ai très mal ».

Le 14 mars de cette même année, un communiqué de presse annonçait qu’en « raison de problèmes de santé », Jane Birkin reportait d’autres dates de concerts.

Quelques temps auparavant, la femme était apparue aux côtés de sa fille Charlotte et de sa petite fille Alice Attal sur le tapis rouge des César, alors que Jane par Charlotte était nominé. Cet hiver 2023, elle chantait sur la scène des Enfoirés.

 

Cet article est paru pour la première fois sur Marie Claire France.

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Des podiums parisiens aux dernières nouveautés skincare qui enflamment TikTok, je décrypte les tendances pour Marie Claire Belgique. Passionnée de voyage, de mode et de beauté, je partage mes coups de coeur dénichés aux quatre coins du globe. En tant que rédactrice en chef digital, j'ai également à coeur de mettre en lumière les histoires inspirantes de femmes à travers notre site et sur nos réseaux sociaux.