Ville fantôme, ville fashion
Ce n’est pas à Lime dans l’état de l’Oregon qu’on penserait trouver de quoi faire son shopping. Des restes d’une ancienne centrale électrique, des blocs de béton, des pneus… pas vraiment l’endroit rêvé pour s’offrir une balade ou une sortie artistique. On se croirait soit dans un cadre parfait pour une scène de crime, soit dans le repère d’une bande de junkie.
Pourtant, si vous passez dans le coin à présent, c’est un véritable sanctuaire du street-art et de la mode qui s’élève. Ces mêmes blocs industriels ont maintenant pris la forme de sacs à main de luxe signés Prada, Chanel, Burberry, Hermès, Givenchy… Une renaissance due au talent de l’artiste américain anonyme Thrashbird.
Si une des bases du street-art est la visibilité et l’occupation de lieux publiques, ce projet « The Valley of Secret Values » prend le contre-pied et se positionne comme un acte de subversion contre le street-art même. Et contre les valeurs de notre société qui nous poussent à consommer et à acheter des articles de luxe pour atteindre une certaine reconnaissance et statut social.
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Consommation, luxe et valeurs
En visitant la zone, Thrashbird fut frappé par l’idée de créer une sorte de cimetière de sacs de designers. Une idée qui donnera la vallée des « valeurs secrètes », dont la morale est double : le projet repose à la fois sur l’idée de rendre artistiquement beau un objet ordinaire et qui tend aussi à interroger notre système de valeurs. Nous donnons en effet trop souvent de la valeur et de la considération à la consommation et la possession de biens, biens qui reflètent aussitôt notre position sociale.
C’est ce qui explique le titre de son oeuvre : « Le titre vient de notre besoin de lier la valeur et le statut des êtres à ce qu’ils possèdent même la plupart d’entre nous n’est pas disposé à l’admettre. Si vous leur posez la question, la plupart des gens diront « je ne suis pas matérialiste » ». Dans un texte qu’il a publié sur son site après avoir dévoilé l’œuvre, il ajoute : « Notre mesure du succès a été faussée. Nous sommes arrivés à une place dans la société où les choses et le statut social sont devenus plus importants que nos liens les uns avec les autres ».
De manière brillamment détournée, Thrashbird présente le monde capitaliste et l’univers de la mode : destinée à un groupe privilégié et départageant ceux qui ont de ceux qui n’ont pas. « J’espère que lorsque les gens verront ces œuvres d’art, ils verront la complexité de l’identité humaine. J’espère qu’ils verront la beauté et j’espère qu’ils verront l’avertissement ».
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