Le patchouli: un parfum de mai 68
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Le patchouli: un parfum de mai 68

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Et si mai 68 avait une odeur? Serait-elle celle du patchouli? A l'heure des commémorations des 50 ans de mai 68, un petit plongeon olfactif s'impose. 

Effluves moites et salées des corps en ébullition, contraste des styles et des genres, le tout mêlé aux notes piquantes et poivrées des grenades lacrymogènes… A quoi pourrait bien ressembler le parfum de la révolution de mai 68? Que portaient ces garçons aux cheveux longs, ces filles aux seins nus sous leur t-shirt, ces ouvriers de chez Renault? 

L’odeur de la révolution

Et si mai 68 avait eu aussi une influence sur la création des parfums? A vue de nez, la question pourrait sembler futile. Pourtant, comme les mouvements de mode et musicaux, le parfum symbolise un courant de la société. 

Bien avant que l’industrie du parfum ne se plie aux exigences des lois du marketing, quelles étaient les fragrances, les matières premières qui ont accompagné le mouvement de mai 68 et du flower power

Dans son livre Le Parfum, Jean-Claude Ellena, nez illustre, créateur de parfums chics et magiques pour des grandes Maisons comme pour des petites marques de niche, s’exprimait en ces termes: « Chaque génération construit son enracinement et ses signes de reconnaissance, qu’ils soient vestimentaires, musicaux, olfactifs, etc. Le parfum est un fait de société, et en ce sens, il est condamné à mourir si on n’entretient pas son mythe et sa mémoire.

 

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Un avant et un après

Plus récemment, dans une interview accordée à l’occasion de la sortie de son livre, “L’Ecrivain d’odeurs”, il expliquait combien le courant de mai 68 avait changé sa vision du parfum. Pour lui, il y a eu un “avant” et un “après”.  

« Disons que j’ai saisi au vol l’air du temps, qu’il m’a séduit et que j’ai su le comprendre (…) Les formules que je pesais alors reflétaient leur temps, destinées à une clientèle bourgeoise et à un mode de vie différent de celui qui a suivi avec la “révolution de 1968”. Libération des mœurs, ouverture du parfum à d’autres publics, changement de société, nouveau roman et nouvelle vague… ≫ 

Et effectivement, tout son parcours a été jalonné par sa recherche de l’épure et de la simplicité. Jean-Claude Ellena aimait d’ailleurs définir les Hermessences comme des Haïkus, ces poèmes japonais qui tiennent en deux mots.

 

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Flower Power 

Mais replongeons au vif du sujet: s’il fallait associer un parfum au mouvement de contestation de mai 68, lequel serait-il?

Une chose est sûre, ce ne serait pas celui de l’iris, symbole de l’aristocratie, ni celui du coquelicot, urbain et sauvage. Tout simplement parce que cette fleur, cousine du pavot, n’a pas d’odeur. Elle symbolise pourtant la paix et la liberté. Elle affronte les fusils dans les pubs des parfums Kenzo et s’accroche au revers des vestes des Londoniens en mémoire des victimes  de la première Guerre Mondiale.

 

Alors en pleine quête de nouvelles valeurs et d’expériences mystiques, la jeunesse de l’époque  rêve d’Orient. Effluves d’encens, de musc, de patchouli et d’autres substances douces illicites (dont bien sûr la marie-jeanne) s’immiscent dans les manifs.

Emblématique du flower power, le patchouli symbolise la liberté sexuelle et l’interdit d’interdire. Contrairement aux parfums de l’époque, il n’a pas de sexe. Ou plutôt, oui: il érotise toutes les peaux, qu’elles soient masculines, féminines ou transgenres…

 

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Ça cocote

A l’origine, le patchouli est une petite feuille, cueillie d’une plante tropicale, qui servait à faire fuir les mites des châles en cachemire. En provenance d’Inde ou d’Indonésie, ils étaient acheminés par bateaux entiers au milieu du 19e siècle. Son odeur a eu un tel succès auprès des Parisiennes, que les parfumeurs s’en s’ont emparé. Les demi-mondaines ou “cocotes” en étaient si folles qu’elles lui ont donné cette aura sulfureuse.

Porter du patchouli, c’est presque un acte de rébellion. On se le procurait dans les drogueries et magasins exotiques, à côté de l’ambre et de la vanille. C

omme l’explique Elisabeth de Feydeau dans son livre “Les Parfums”, « Le geste parfumé n’est pas neutre : il est langage et expression de l’indépendance, de l’insolence, de la liberté. Les familles olfactives florale, chyprée et ambrée vont se parer d’accords nouveaux pour exprimer ce désir de libération de la femme.

La quête de ce nouvel exotisme inspirera des marques comme Réminiscence mais aussi Yves Saint Laurent avec Opium, Thierry Mugler avec Angel et j’en passe.

 

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Le patchouli, un parfum de compromis

Aujourd’hui, que reste-t-il du patchouli ? Son odeur terreuse, un peu moisie, son sillage “too much” a fini par lasser dans les années 2000. Aujourd’hui, grâce à des nouvelles technologies d’extraction, le patchouli fait son grand retour.  Plus épuré, moins terreux, le “nouveau patchouli” offre une facette plus douce que l’originale. 

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