“Je suis à la retraite … active depuis 2014, et je ne tiens pas du tout à m’arrêter”, s’exclame Clotilde*, 70 ans, journaliste. “Ralentir peut-être, mais surement pas arrêter de travailler. J’ai des excuses : j’adore mon métier (suivre des conférences de Presse, interviewer des experts, etc) et je suis loin d’être lassée, blasée. En outre, je revois régulièrement des confrères – aujourd’hui à la retraite – et pour certains, c’est pathétique : ils ont l’impression d’avoir perdu leur statut social”, poursuit-elle.
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Sur les 16,1 millions de retraités, 3,3% exercent encore une activité professionnelle. Sans compter les actifs qui retardent au maximum leur départ. C’est le cas par exemple de Patrice*, 64 ans, chef d’entreprise qui devrait déjà avoir “raccroché” depuis un an environ. “Je travaille avant tout par passion. J’aime l’idée de pouvoir poursuivre le développement de mon entreprise, pour la vendre dans les meilleures conditions”, raconte-t-il. Son départ en retraite ? “Progressivement à partir de 2019”, souffle-t-il mais tout en restant en contact malgré tout avec le milieu professionnel, comme en exerçant “une activité de conseil au ¼ temps, par exemple”.
Garder un pied dans la réalité
“Trois quarts des Français souhaiteraient dans l’idéal partir à la retraite à 60 ans ou avant” : voici ce qui ressort du dernier rapport de la DREES** datant du 16 mai dernier. Pourtant, si pour certains, l’idée de partir à la retraite représente une libération et la conclusion d’une vie professionnelle épuisante, pour d’autres, c’est tout l’inverse. “Depuis le 1er janvier 2009, chaque salarié peut cumuler sa retraite de base avec ses revenus salariés sans limitation de montant (mais sous certaines conditions)”, explique Valérie Gruau, fondatrice du site seniorsavotreservice.com, spécialisé dans l’emploi des retraités qui veulent rester actifs.
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Fondé en 2008, le site cumule aujourd’hui 320 000 membres***, dont Géraldine, 69 ans, à la retraite depuis 5 ans déjà et auto-entrepreneuse. “Si je travaille toujours, c’est à la fois parce que le montant de ma retraite est faible, mais, aussi parce que je souhaitais garder une vie active. Face à la jeunesse de plus en plus active, exigeante, je ne vois pas comment garder un contact enrichissant si on ne garde soi-même un pied dans la réalité”, explique-t-elle.
Le fait de partir à la retraite a également un impact psychologique : selon le dernier rapport de la DREES, 25% des personnes interrogées qui optent pour une prolongation d’activité le font “parce qu’ils ne se sentent pas près à devenir retraités”. “Pour ma part, j’avais promis d’arrêter de travailler dès que je serai grand-mère”, se souvient Clotilde. “Et puis non : je me débrouille pour jongler entre les conférences de presse, les interviews, la rédaction des papiers, et les sorties d’école quand les parents sont indisponibles, les ballades au square et les dessins animés au cinéma, les samedis ou dimanches. Je ne culpabilise pas : si j’étais grand-mère à plein-temps je pense que je serais frustrée”, philosophe-t-elle.
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Compétences et formation continue
Pour les entreprises, ces salariés seniors sont une véritable chance : outre le fait qu’ils aient un vrai bagage professionnel, ils ne sont souvent plus dans une optique carriériste et ne risquent donc pas de claquer la porte pour une autre entreprise. D’autant que, selon les fonctions qu’ils occupent, nombreux sont ceux à vouloir rester compétitifs. “Je suis des cours pour me perfectionner dans des logiciels comme Photoshop ou Indesign”, détaille Géraldine, qui travaille pour différents clients en tant que secrétaire. “Je m’informe aussi des modifications fiscales et de tout autre changement qui peuvent intéresser mes clients. N’allez pas croire que c’est simple ! Je sens bien parfois que mon cerveau n’a plus la vivacité ou souplesse d’autrefois. Mais je persiste et à chaque pas conquis, je ressens un vif plaisir”, complète-t-elle.
“J’arrêterai de travailler quand le job ne m’amusera plus et lorsque l’on me fera sentir que l’on n’a plus besoin de moi”, envisage Clotilde. Qui ne compte pas pour autant tout arrêter : “à ce moment-là, j’opterai sûrement pour des activités caritatives, des conférences culturelles ou des cours de restauration de meubles anciens … ma passion. Mais je le répète…le plus tard possible !”, conclut-elle.
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Source: marieclaire.fr
*Certains prénoms ont été changés à la demande des intéressés
**DREES : Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistique
*** 320 000 membres comptabilisés en base de données (ndlr) sur seniorsavotreservice.com