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Depuis toujours, Clélia est sensible à la cause féministe. Mais c’est après une discussion avec sa mère, où celle-ci fait part de ses complexes d’un corps moins « ferme », et un covoiturage en Suisse où une femme lui avoue avoir fait de la chirurgie esthétique après un adultère, qu’elle ressent une réelle injustice. Clélia a presque envie de devenir un homme pour ne pas avoir à vivre ça. Et c’est le départ de son projet : lutter contre cette course malsaine à tenter de rester jeune, avec pour seule arme, son regard de photographe féministe.
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Entretien avec Clélia Odette
Tu penses qu’il existe un manque de représentation des femmes après la ménopause ?
Oui ! C’est dingue par exemple, le nombre de femmes âgées qui ont recours à la chirurgie esthétique. C’est un cercle vicieux, si une femme se fait refaire elle est jugée mais si elle ne le fait pas elle est exclue de l’industrie de la mode, du cinéma ou encore de la musique. Où sont-elles ? Je veux voir des beautés brutes pour que l’on s’habitue à aiguiser notre regard sur elles. Plus il y a de photos, plus on va s’habituer au fait que le corps n’est pas parfait et moins ça constituera une source de souffrance pour celles qui ne répondent pas aux codes.
« Un corps qui change c’est beau et normal . Pourquoi doit-on le cacher ? »
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Comment as-tu trouvé tes modèles ?
La première femme, c’était dans un atelier de modèle vivant où j’ai moi-même posée nue et elle a été très dure à trouver. Elle avait du mal à se dénuder et à se trouver belle. Personnellement, je l’ai trouvée magnifique. J’ai beaucoup travaillé avec des modèles. Surtout, il était primordial de les informer que je ne voulais pas faire des photos érotiques. Je veux juste montrer des corps banals, pas les objectiver.
Quels ont été les retours des femmes photographiées sur ton travail ?
J’ai photographié 21 femmes. La plupart d’entres elles se sentaient pas belles, tristes… Je pense que c’est difficile de se voir à travers le regard de quelqu’un et s’accepter. D’autres m’ont remercié. Mon objectif est de créer une mise en confiance, où je discute avec elles avant de les photographier… C’est elles qui se blâment, alors qu’elles sont magnifiques.
« Il existe une course malsaine pour rester jeune. Je veux laisser la place aux corps qui sont différents parce qu’ils sont sublimes. »
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Quels ont-été les retours sur ce projet ?
J’ai reçu énormément de messages de femmes venant du monde entier et qui me remerciaient, me voyant comme un porte-parole. C’est en partie pour ça que je souhaite continuer ce projet. À l’avenir, je veux photographier des femmes de cultures différentes… Il faut donner aux femmes la place qu’elles méritent.
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Quel a été ton processus de travail ?
Au départ, c’était compliqué parce que j’ai grandi avec cette injonction qu’un corps qui vieillit, ce n’est pas beau. J’avais du mal à porter un regard neutre sur les photos. À force de les regarder, les entendre, les écouter, j’ai adouci mon regard. Je ressens plus de respect et d’amour, même si ça a l’air cucul. C’est aussi en banalisant le nu qu’on va pouvoir questionner notre regard. Pour cela, je ne retouche pas les photos et choisis du noir et blanc pour qu’on se concentre uniquement sur les modèles. Avec l’évolution de mon propre regard, j’ai l’espoir que ceux des autres changent.
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Une démarche inspirante
À présent, Clélia rêve de donner des conférences, aller dans les écoles et sensibiliser les gens. Au départ, elle n’était pas persuadée de la pertinence du projet. Pourtant « Belles Mômes » a reçu un vrai succès avec de nombreux messages de femmes du monde entier. L’objectif est désormais de l’étendre et d’en faire un livre auto-financé. Et puis elle prépare d’autres projets féministes… à suivre !
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