La Cambre Mode(s), la mode de demain en 6 portraits
© La Cambre Show 16 par Michael Marson

La Cambre Mode(s), la mode de demain en 6 portraits

Temps de lecture: 12 min

Le début du mois de juin annonce l’arrivée du beau temps et le rendez-vous tant attendu des amoureux de la mode: le show de fin d’année de La Cambre Mode(s). Coup de projecteur sur 6 étudiants qui feront la mode de demain.

Trois grandes écoles jouissent d’une reconnaissance internationale pour la qualité de leur enseignement de la mode, et surtout, des pépites qui en sortent et seront les créateurs recherchés par les grandes maisons. Ces trois écoles sont La Cambre Mode(s) à Bruxelles, l’Académie Royale des Beaux-Arts à Anvers et la Saint Martin’s School of Art à Londres. Pour comprendre ce qui émeut et influence les étudiants de la Cambre, nous leur avons donné la parole à chaud, juste après la présentation de leur jury tant redouté !

Vivant, énergique, surprenant, le Show 2017 se tiendra les 2 et 3 juin prochains aux Halles de Schaerbeek. Le jury sera composé de Olivier Theyskens, Cédric Charlier, Nicolas di Felice (assistant de Nicolas Ghesquière chez Louis Vuitton), Christina Zeller (Delvaux), Mauro Grimaldi (président directeur général d’Emilio Pucci), Francis Kurkdjian (parfumeur), Samudra Hartanto (premier assistant de Jean-Paul Gaultier), Sami Tillouche, Manon Schaap, Nathalie Khan (curatrice, journaliste mode et enseignante de l’histoire de la mode à Saint Martin’s School of Art), Oriane Leclercq (designer chez ACNE), Nazanine Ghaznavi (directrice des collections homme chez Balenciaga) et Françoise Plaud (ex-directrice du sudio Lanvin, Cacharel et Cédric Charlier).

Près de 140 jeunes se présentent chaque année à l’examen d’entrée de la première année, une quinzaine d’élus seront retenus pour leur fraîcheur, leur enthousiasme, leur vraie curiosité ou le parcours déjà accompli. Petit échantillon de choix.

Clément Grangier

Clément Grangier - 4ième année

Clément Grangier – 4ième année

Age : 24 ans
Origine : France
Pourquoi la mode ?
Une histoire de construction. Construire des choses, en mouvement. Pas quelque chose qui reste trop figé comme le design mais qui apporte un peu de vie aussi.
La mode est une forme d’expression artistique, quelle serait pour toi la réalisation d’une collection réussie ?
Créer une émotion. Je pense que c’est suffisant.
Un créateur, un univers qui t’inspire, te fait rêver ?
Les archives Helmut Lang, car il ne fait plus de collection. Son travail reste, aujourd’hui encore, très novateur.
Le créateur le plus proche de tes aspirations, de ta perception de la mode ?
Raf Simons. J’ai pu observer sa façon de travailler lors d’un stage chez Dior. Je n’aimais pas ses collections au début, probablement par manque de maturité. Mais quand je les regarde aujourd’hui, j’arrive à voir son génie, à comprendre et aimer ce qu’il propose. Ce sont des collections très complexes à comprendre et c’est probablement pour cela que sa première collection chez Dior n’a pas beaucoup plu au premier abord.
Une époque ?
Je dirais les années 40. Je trouve que c’était cool.
Une matière ?
Le cuir, c’est la mode je crois (rires). Après des demandes de sponsoring non fructueuses pour des matières biologiques (faux cuir) qui sont plus chères.
Parle-nous du thème de ta collection.
Je me suis inspiré d’une vieille femme qui se souvient de la garde-robe de toute sa vie ! Un mélange de 80 ans de style de mode de vêtements. C’est beaucoup de références, le résultat de petites tranches de femmes que je connais et que j’ai essayé de réunir.
Ce que La Cambre t’a apporté.
Du non-conformisme, des cernes et beaucoup de résistance à la pression de création et de production.

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Milena Walter

Milena Walter - 5ième année

Milena Walter – 5ième année

Age : 25 ans
Origine : France
Pourquoi la mode ?
La création de silhouettes, assembler les vêtements m’a toujours plu. J’avais mon carnet avec les silhouettes nues où je dessinais des vêtements. Après le bac, à tout juste 17 ans j’ai été en lettres modernes à la Sorbonne et je suivais en même temps des cours de dessin avec l’illustrateur Oscar Astiz (a travaillé avec Galliano) qui m’avait vivement conseillé de passer le concours de La Cambre en voyant ma façon de dessiner.
La mode est une forme d’expression artistique, quelle serait pour toi la réalisation d’une collection réussie ?
Me sentir proche de la femme qui porte la collection, et désirer la porter. J’aime les couleurs sombres, le bleu marine, le noir… des goûts assez personnels. Je me sens proche de Céline, Christophe Lemaire ou Hermès.
Un créateur, un univers qui t’inspire, te fait rêver ?
Une collection réussie doit nous faire ressentir quelque chose, et être poétique.
Le créateur le plus proche de tes aspirations, de ta perception de la mode ?
Anne Demeulemeester.
Une époque ?
Les années 2000, me disent les profs, Tom Ford ou AF Vandervorst par exemple dans leur vision du sexy !
Une matière ?
Le cuir.
Parle-nous de ta collection.
Elle s’inspire du deuil amoureux, des marques qu’on garde du passé et surtout de la mémoire de l’autre et comment on se sort de cette situation. Je me suis aperçue à la fin de l’année que mes silhouettes représentaient les étapes de ce deuil !
La première silhouette part d’un drap, des souvenirs de l’autre qui se resserre sur son corps et recrée le sentiment d’asphyxie comme le dernier souffle qui n’est pas dans le négatif… c’est plutôt un éloge de l’autre, d’un passé. Les silhouettes deviennent ensuite de plus en plus construites, une carapace qui s’enlève et la femme devient plus forte et plus sûre d’elle-même. Ce n’était pas voulu, mais il y a une thérapie dans ma collection. Cette capacité de transformer quelque chose de triste en quelque chose de beau.
Ce que La Cambre t’a apporté ?
De la maturité et de la force. La Cambre c’est un peu les Hunger Games … le tram 93, c’est comme le train pour arriver à Hunger games (rires.) A La Cambre, on apprend tout de A à Z contrairement aux autres écoles où c’est plus ciblé et c’est une école publique donc accessible à tous. A l’image des parents, on doit se démerder, on leur en veut et puis on se rend compte qu’ils nous ont tout appris. Par exemple, la recherche des sponsors pour les tissus, trouver nos mannequins, il y a tellement de choses à faire. Rien ne nous est donné et c’est toute la richesse de notre enseignement.

Si ce sujet vous plaît, allez faire un tour sur « Les mannequins belges qui montent« , « Sé-ach, le label belge à suivre » et « NATAN Collective: collaboration avec 4 jeunes designers belges« 

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Grimaud Leclercq

Grimaud Leclercq - 5ième année

Grimaud Leclercq – 5ième année

Age : 23 ans
Origine : Belgique
Pourquoi la mode ?
Ma grand-mère cousait énormément. Elle faisait l’équivalent d’une collection par an à elle toute seule et pour elle-même ! Elle a fait les robes de mariée de ses trois filles. Cela m’a inspiré.
La mode est une forme d’expression artistique, quelle serait pour toi la réalisation d’une collection réussie ?
Une collection qui reste fidèle à son thème, à l’engagement de départ. Savoir ensuite l’ouvrir par l’ennoblissement, les couleurs, les coupes, les matières, de la brillance ou du mat. Mais aussi une collection qui soit riche. Une surprise, quelque chose d’inattendu à chaque silhouette.
Un créateur, un univers qui t’inspire, te fait rêver ?
Alessandro Michele chez Gucci. Dans le monde de la mode assez torturé, les créateurs qui parviennent à garder quelque chose de très fun, léger et de l’autodérision. Comme Albert Elbaz, Jérémy Scott chez Moschino ou Donatella Versace, géniale, fun et très humble à la fois. Nicolas Ghesquière chez Balenciaga, et Raf Simons pour le côté conceptuel.
Le créateur le plus proche de tes aspirations, de ta perception de la mode ?
Albert Elbaz, sa mode très élégante et joyeuse à la fois. Jean-Paul Gautier, fidèle à ce qu’il est. Ces créateurs ont été marqués dans leur travail par leur enfance.
Une époque ?
L’instant présent. Je suis passionné par la pop culture, les phénomènes dans la musique, le cinéma, la mode. Ce qui touche une grande partie de la population me passionne.
Une matière ?
Tout ce qui brille, mais ça change tout le temps. En revanche, je sais ce que je n’aime pas : le caoué (rires).
Parle-nous de ta collection.
J’ai travaillé sur une émission de télé réalité : Rupaul’s Drag Race, un concours pour élire la meilleure drag queen américaine. Un reportage dans ID magazine, inspiré de l’émission, présentait cinq femmes qui pratiquaient l’art drag, pour les hommes initialement. Par l’impact de cette culture sur les gens, et même les femmes, il y a une forme de légitimité dans leur art ne visant pas à définir des femmes réelles, mais une forme de super héro de la femme, exacerbée dans sa féminité à l’image de comiques comme Wonder Woman. Corsetée, maquillée, et l’aspect douloureux de cet art peut faire écho à la condition des femmes avant Coco Chanel. Ce n’est pas ma perception, je me suis donc approprié ce thème en créant des coupes et des formes du corps de la femme sans la torturer. Un peu comme une collection pour la femme drag queen débutante qui n’a pas envie de trop souffrir !
Ce que La Cambre t’a apporté ?
La technique et la capacité de me remettre en question, et aller au bout de mes idées.

 

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Gabriel Figueiredo

Gabriel Figueiredo - 5ième année

Gabriel Figueiredo – 5ième année

Age : 26 ans
Origine : France
Pourquoi la mode ?
Une envie de vêtements depuis toujours.
La mode est une forme d’expression artistique, quelle serait pour toi la réalisation d’une collection réussie ?
Une énergie, des collections créées avec conviction et envie. Je trouve que cela se ressent très fort.
Un créateur, un univers qui t’inspire, te fait rêver ?
Martin Margiela, John Galliano à ses débuts chez Dior. Deux figures aux univers très différents avec une énergie, une intention hyper forte dans leur boulot.
Le créateur le plus proche de tes aspirations, de ta perception de la mode ?
Martin Margiela, dans sa façon de voir les choses, la mode. Moins dans son esthétique.
Une époque ?
Fin des années 90, début 2000. J’étais ado, c’est une période qui m’a marquée et où j’ai commencé à être sensible aux vêtements. Il y avait beaucoup de fun, du très spectaculaire dans la mode.
Une matière ?
J’aime quand ça brille ! Les matières assez festives. J’ai dans ma collection un costume couvert de strasses.
Parle-nous du thème de ta collection.
Je suis parti d’un constat. Le style normcore fait de basiques est très répandu dans mon entourage alors que nous avons des références comme le spectaculaire et show off en vogue dans les années 2000 (Galliano par exemple). A l’inverse de la mode d’aujourd’hui hyper réaliste, pragmatique et fonctionnelle, j’ai voulu retrouver cette énergie décomplexée, du fun et proposer cela à ma génération. C’est une collection mixte où j’habille mes amis.
Ce que La Cambre t’a apporté ?
Le bagage technique et arriver à retranscrire mon univers dans un vêtement.

Si ce sujet vous plaît, allez faire un tour sur « Les mannequins belges qui montent« , « Sé-ach, le label belge à suivre » et « NATAN Collective: collaboration avec 4 jeunes designers belges« 

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Cyril Bourez

Cyril Bourez - 4ième année

Cyril Bourez – 4ième année

Age : 25 ans
Origine : France
Pourquoi la mode ?
Le domaine artistique était une évidence. Etant assez pragmatique, la technique et l’aboutissement à un objet me convenaient parfaitement. Je suis très matérialiste ! Avec un fort besoin de possession, j’aime acheter des disques, des livres…
La mode est une forme d’expression artistique, quelle serait pour toi la réalisation d’une collection réussie ?
Une collection qui présente des images fortes dans lesquelles on pourrait se projeter. Des pièces qui donnent envie d’être portées. Par exemple, des poches qui soient là quand on a envie de mettre les mains dans les poches, de l’évidence simple.
Un créateur, un univers qui t’inspire, te fait rêver ?
Dries Van Noten pour la beauté des inspirations, le mélange des choses. Sa simplicité aussi et le côté honnête de son travail.
Un créateur qui serait le plus proche de tes aspirations, de ta perception de la mode ?
Dries Van Noten encore. Peut-être aussi par rapport à la logo magna ambiante. Lui, il y a répondu en mettant comme logo celui de ses fournisseurs de coton et de laine depuis 40 ans. C’est sensible et vrai. Et pour le côté on habille ses amis, les gens qu’on aime, Alexandre Mattiussi (AMI).
Une époque ?
Le présent : on mélange tout. On est arrivé à une très forte simplicité. Il y a deux ans, on voyait beaucoup des robes blanches et des chemises blanches. Après tout le spectacle des créateurs comme John Galliano, Mc Queen, je pense qu’on est dans un moment un peu charnière où les gens sentent qu’ils doivent proposer de nouvelles choses, créer de nouvelles identités de marque. J’aime l’aspect très ouvert du présent.
Une matière ?
Le velours côtelé. Un mec en veste ou pantalon en velours côtelé, c’est pour toujours.
Parle-nous du thème de ta collection.
Je me suis inspiré de pièces iconiques de l’histoire de la mode : le manteau des fifties de Christian Dior, le tailleur Chanel, le corset Jean-Paul Gaultier. Des pièces qui me faisaient rêver quand j’étais ado et qui m’ont donné envie de faire de la mode. C’est une transposition de ces grandes images de la mode féminine sur le vestiaire masculin mais en gardant un look très mec.
Ce que La Cambre t’a apporté.
De l’assurance, de la maturité et de la technique.

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Adèle Andreone

Adèle Andreone - 5ième année

Adèle Andreone – 5ième année

Age : 25 ans
Classe : master 2
Origine : France
Pourquoi as-tu choisi la mode ?
Elle m’a toujours fort interpelée. Ce n’est qu’après plusieurs années d’études en graphisme que j’ai débuté la mode. Je me suis lancée dans l’inconnu car je ne savais absolument pas à quoi m’attendre, mais j’avais une grande envie de mêler ce que j’avais déjà appris en graphisme et le transposer dans le vêtement. Quand j’ai commencé, je me suis aperçue que ce n’était pas ce à quoi je m’attendais ! L’apprentissage technique est faramineux, mais le déclic est venu une fois que mes bases techniques me permettaient de montrer ce que j’avais en tête. Et à partir de là, j’ai adoré.
La mode est une forme d’expression artistique, quelle serait pour toi la réalisation d’une collection réussie ?
La mode, pour moi, doit rester quelque chose de populaire. Une collection réussie est une collection qui pourrait parler à tout le monde, qui ne soit pas élitiste.
Un créateur, un univers qui t’inspire, te fait rêver ?
Jean-Paul Gaultier. Je travaille avec lui depuis deux ans pour sa vision de la femme, ultra-féminine. Une féminité exacerbée, il aborde des sujets très pointus dans la mode avec un questionnement systématique et ça parle au grand public. Les créateurs de prêt-à-porter aussi, qui restent très créatifs comme Anne-Sophie Back.
Le créateur le plus proche de tes aspirations, de ta perception de la mode ?
J’évite de trop me référer à des créateurs qui existent déjà.
Une époque ?
Les années 1970 qui présentent des coupes intéressantes.
Une matière ?
Le caoué.
Parle-nous du thème de ta collection.
Je me suis inspirée de la comtesse Elizabeth Báthory, une comtesse slovaque du 15ème siècle connue comme la plus grande serial killeuse de tous les temps (elle a inspiré le personnage de Dracula). Obsédée par la vieillesse, elle tuait les jeunes vierges de son village pour prendre des bains de leur sang pensant pouvoir rajeunir. Elle fut jugée et emmurée dans son château en face d’un miroir pour qu’elle puisse voir son corps vieillir. L’interprétation, très juste de Delphine Seyrig dans le film « Daughter of darkness » qui se déroule dans un hôtel à Ostende en 1970 a été une inspiration.
Ce que La Cambre t’a apporté ?
La rigueur, s’accrocher à ses idées quoi qu’il en coûte, savoir aussi se nourrir des autres, ce qu’ils ont à vous apporter (étudiants, professeurs, proches) et proposer un travail lisible aux yeux des gens.

Si ce sujet vous plaît, allez faire un tour sur « Les mannequins belges qui montent« , « Sé-ach, le label belge à suivre » et « NATAN Collective: collaboration avec 4 jeunes designers belges« 

Marguerite Durant Voir ses articles >

La mode est fascinante ! C’est le miroir de notre société, de notre présent. Passionnée de violoncelle aussi… et de musique électronique.

Tags: Académie d'Anvers, Bruxelles, Défilé, La Cambre, Mode, Saint Martins.