La face cachée de Picasso, l’homme qui détruisait les femmes
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La face cachée de Picasso, l’homme qui détruisait les femmes

Par Charlotte Verbruggen
Temps de lecture: 3 min

Cinquante ans après sa mort, Picasso ne cesse d'être célébré. Pourtant, derrière les œuvres acclamées, se cache un homme misogyne et violent envers les femmes qui ont partagé sa vie.

Ses œuvres se vendent à prix d’or et chaque année des dizaines d’expositions rien qu’en Europe lui sont dédiées. Selon la RTBF, en 2023, actuellement, ce ne sont pas moins de 42 expos qui se sont ouvertes ou vont s’ouvrir, partout dans le monde, à l’occasion de l’anniversaire de la mort de Picasso. Pourtant, derrière le succès artistique, il y a un homme qui a fait preuve d’une grande violence envers ses compagnes.

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Picasso, une version contemporaine de Barbe bleue

L’artiste a été en couple officiel avec Fernande Olivier, Eva Gouel, Olga Khokhlova, Marie-Thérèse Walter, Dora Maar, Françoise Gilot et Jacqueline Roque. Danseuse, photographe ou encore peintre… La plupart étaient des artistes prometteuses, voir déjà reconnues, avant de rencontrer Picasso. Longtemps décrites comme des muses, elles étaient davantage des victimes de violence conjugale qu’il isolait et brutalisait physiquement et psychologiquement. Par exemple, Marie-Thérèse Walter a 17 ans, contre 46 pour Picasso, lorsqu’elle le rencontre. En 1974, elle dira de lui sur les ondes de France Culture : « d’abord il viole la femme puis on travaille ».

Picasso voulait les avoir à sa merci et être le seul du couple à briller par son talent. Ses compagnes devaient se mettre en retrait professionnellement. Leur carrière a bien souvent été écourtée comme l’explique l’artiste Amande Art, qui milite à ce sujet sur ses réseaux sociaux, dans un article des Grenades. Parmi elles, Marie-Thérèse Walter et Jacqueline Roque vont finir par se suicider, tandis que Dora Maar va sombrer dans la dépression. Picasso aimait le pouvoir et contrôler les femmes avec qui il entretenait des relations. De ce que l’on sait, aujourd’hui, le peintre avait tous les traits de l’homme toxique. C’est ce que déclare Julie Beauzac dans son podcast « Picasso, séparer l’homme de l’artiste« .

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L’omerta

Pendant longtemps, Picasso a pu bénéficier de la loi du silence. Par exemple, Françoise Gilot, sa sixième femme de 40 ans sa cadette, a écrit un livre dans lequel elle révèle la réalité de sa vie avec lui. Elle écrit avoir entendu de sa bouche, “les femmes sont des machines à souffrir”. Cette déclaration illustre bien la vision que le peintre avait des femmes. L’ouvrage « Vivre avec Picasso » fut publié après que Françoise Gilot ait quitté l’artiste. Elle fut la seule de ses compagnes à le faire. Picasso a cherché à interdire la publication du livre par 3 fois. Le témoignage de Françoise a été très mal reçu en Europe. Si bien qu’elle s’est installée à New York, loin des attaques.

pablo picasso Francoise Gillot

Pablo Picasso et Francoise Gillot en 1952. ©Roger Viollet via Getty Images

Mais ces intimidations n’ont jamais fait taire Françoise Gilot. Elle a également pris la parole dans un documentaire Arte sorti en 2020 et y déclare, « il a voulu m’écraser comme une punaise » ou encore « si vous étiez en admiration devant lui, vous passiez au moulinet. Vous rentriez personne et sortiez saucisse. » Elle-même peintre, elle revient sur l’enfermement dont elle a été victime de la part de Picasso, « j’étais avec lui quand j’ai peint la cuisine, vous voyez bien que ça ressemble à une prison ! » Un témoignage aussi poignant que difficile qui illustre bien l’emprise que cherchait à avoir Picasso sur les femmes qu’il a côtoyé.

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La violence comme moteur de création

Picasso se nourrissait créativement de la violence qu’il infligeait à ses compagnes. Il a construit une partie de sa notoriété sur cette violence. Sa série à succès, « La femme qui pleure », en est un exemple criant. Ces tableaux représentent Dora Maar, la prédécesseur de Françoise Gilot, en grande souffrance. Un tableau glaçant qui l’est encore davantage lorsqu’on connaît la violence derrière. « En plus d’humilier quotidiennement Dora Maar, Picasso la frappait régulièrement, parfois même jusqu’à ce qu’elle perde connaissance. Il a mis cette violence dans son art, la série Femme qui pleure représente Dora Maar avec un visage déformé par la douleur et l’angoisse. », dénonce Julie Beauzac dans son podcast « Picasso, séparer l’homme de l’artiste ».

Françoise Gilot, quant à elle, écrit dans son livre qu’un jour, Picasso l’a surprise en train de pleurer. Et, au lieu de la consoler, il s’est mis à la peindre, inspiré par sa souffrance, en lui disant, « votre figure est merveilleuse aujourd’hui ». En 2023, si la vérité n’est plus niée, le mythe Picasso demeure encore intact pour la majorité des gens. Il est donc impératif de contextualiser les oeuvres de Picasso quand on connaît la violence qui se cache derrière. C’est une question de respect pour les femmes dont le talent et parfois même la vie ont été sacrifié par Picasso, un homme qui plaçait sa personne et sa renommée au-dessus du bien-être et de la vie de ses compagnes.

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