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Cœur-d’amande, de Yasmina Khadra
« Je considère l’existence comme une
offrande inespérée sous une cloche
de verre piégée. »
C’est d’abord un vibrant hommage à la vie de quartier, la solidarité, la bienveillance et la sympathie. Une mise en valeur des gens ordinaires, pas nécessairement gâtés par l’existence, à l’image du héros, Nestor, surnommé «Cœur-d’amande», abandonné par sa mère parce qu’elle l’a d’emblée trouvé trop petit. Ce «nain», tel qu’il se décrit lui-même, vit chez sa grand-mère et cultive une forme de joie de vivre contagieuse, conscient que la vie est un cadeau malgré tout. Un personnage touchant que l’on se surprend à adorer tout de suite et sur lequel on a envie de veiller, tant il ne cesse de trouver des pirouettes pour rendre l’existence jolie, intense, drôle, faisant fi d’une anormalité physique dont il refuse qu’elle dicte son destin, déjà fort mis à mal par une maman non aimante. Quand sa grand-mère doit être placée et que l’appartement, son refuge, va être vendu, il puise en lui une force qui soulève des montagnes et qu’il extériorise avec ses mots, en décidant d’écrire un livre. On ne lâche pas ce récit ni ce héros peu ordinaire, qui nous donnent ce dont on manque souvent et qui est pourtant un formidable outil vers un certain bonheur : le courage.
Mialet-Barrault, 21€
L’impossible retour, d’Amélie Nothomb
« Tout plutôt que laisser place au
désespoir, à ce sentiment d’échec et de trahison. »
Et voici son trente-troisième roman… La romancière belge dit de chacun qu’elle les porte dans son ventre, tels des bébés de papier que la maman aguerrie met au monde chaque année et confie au public, dont la sentence fera le reste. Adoubée ou détestée, l’écrivaine sait que chaque titre est décortiqué avec une précision chirurgicale, par ses fans comme par ses détracteurs. Le cru 2024 nous emmène au Japon, «sa terre sacrée» qu’elle adule. Un voyage qui s’apparente à un questionnement intérieur sur cette incapacité à vivre sur cette île à laquelle elle porte un amour pourtant infini et qu’elle s’oblige toujours à quitter, sorte d’histoire impossible qu’elle qualifie elle-même « d’échec amoureux», alors que le coup de foudre la terrasse chaque fois qu’elle y retourne. Des retrouvailles qui blessent, écorchent, bouleversent, autant que les contours de cette relation à la fois chagrine et ambigüe avec ce pays qui la hante et l’obsède. Un comble, quand on sait que les Japonais ne sont pas familiers de notre concept de nostalgie, associé à une forme de mélancolie, le souvenir n’étant chez eux pas associé au regret, mais au beau. Une introspection touchante.
Albin Michel, 18,90€
Célèbre, de Maud Ventura
« Depuis le début, cette citadelle me
protège autant qu’elle m’isole. »
Il faut se rendre à l’évidence : la notoriété, banalisée, est devenue un tel phénomène sociétal qu’on en oublierait presque qu’elle flirte souvent avec l’obsession, voire la pathologie. Véritable tyrannie contemporaine, l’injonction à la surexposition de soi à tout prix peut parfois s’avérer monstrueuse. Artifices, calculs, mises en scène et culte de soi, Cléo n’a qu’un seul but depuis qu’elle est enfant : devenir célèbre. D’une froideur inouïe, l’héroïne terrorise, nargue, malmène et n’épargne personne, à commencer par elle-même et nous, lecteurs horrifiés par cet univers lisse en apparence et où le rêve s’apparente plutôt au cauchemar, où la stratégie n’a aucune limite. On suit l’ascension de Cléo avec une addiction qui s’installe au fil des pages, happé par l’histoire menée de main de maître par l’autrice dans ce deuxième roman qui dérange, bouscule, captive et passionne. Un récit mené au «je» et parfaitement tissé, qui tient en haleine jusqu’au point final et dont la fin est jubilatoire. C’est cruel, intelligent et drôle. Une pépite.
L’Iconoclaste, 21,90€
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