Elle avait cette voix apparemment fragile qu’une émotion pouvait interrompre. Mais pas briser. Elle était, en interview, un vrai moulin à paroles. Jane Birkin parlait comme un livre ouvert. Elle évoquait ses filles, Kate -dont elle ne s’était pas remise de la mort-, Charlotte – qui a réalisé récemment un documentaire sur sa mère- et Lou -la plus jeune, qu’elle voyait le plus souvent-. Et Serge, bien sûr. Entre nous, on ne disait pas : Serge Gainsbourg mais Serge car, il n’y en avait qu’un seul comme lui. D’ailleurs, la première fois que j’ai pu assister à un concert de Jane, c’était au Bataclan à Paris en 1987. Et Serge y assistait. Il s’était installé, debout, au fond de la salle. C’est la première fois que Jane montait sur scène. Son trac était perceptible. Lorsqu’elle a interprété « Les dessous chics », mon voisin s’est mis à pleurer. C’était si beau, si pur.
Lorsqu’elle venait à Bruxelles, elle logeait toujours à l’Hôtel Amigo car, c’était l’hôtel préféré de Serge. Elle ne venait pas seule mais avec sa chienne. Un bulldog anglais qui dormait (et ronflait) durant l’interview. Elle arrivait aussi avec le fameux sac qui portait son nom. Un jour, elle m’a raconté comment la création du Birkin avait été décidée durant un trajet en avion où elle avait rencontré le boss de chez Hermès. Le sac avait été conçu pour elle et sa vie mouvementée. Elle le recouvrait d’autocollants et de rubans. Son Birkin à elle ne ressemblait pas du tout à celui d’une dame chic et fortunée. Mais je le trouvais fabuleux !
Jane était une artiste dans tous les sens du terme. Elle était aussi une femme engagée. Et était prête à apporter son soutien à bien des causes justes. S’il y a un qualificatif qu’on peut lui accoler, c’est celui de généreuse. La dernière fois que je l’ai vue sur scène, c’était au Cirque Royal, à Bruxelles, en avril 2022. Sa santé n’était pas formidable depuis un bon moment. Elle ne pouvait pas rester debout très longtemps, aussi, on lui avait installé un tabouret. Elle a assuré le show comme une reine. Et toutes ses chansons tombaient impeccablement bien. C’était très émouvant. Et cette fois-là encore, ma voisine a versé une larme. Je serais incapable de choisir une seule chanson parmi toutes celles qu’elle a chantées. Je retiens les moments qu’elle a partagées avec moi, avec nous. Et je lui envoie mes meilleures pensées là où elle se trouve maintenant. Avec Serge, Kate et la chienne Dolly.